L’ExCo Mondial s’est réuni à Namur, en Belgique, durant l’Octave de Pâques.
L’Assemblée Mondiale a révélé qu’il était possible d’être à l’écoute du Seigneur tout en étant attentifs à nos responsabilités ; nous étions dès lors animés par ce même désir. Le fait de travailler consciencieusement en tant que Conseil Exécutif ne peut nous dispenser d’agir comme une communauté de discernement, petite en taille et pourtant universelle. Aussi logique que soit la proposition, cela exige une conversion, particulièrement dans le chef de ceux qui se sentent responsables.
Comme les disciples d’Emmaüs, nous avons une fois de plus fait l’expérience de la présence de Dieu tandis que nous réfléchissions à ces événements à la lumière de l’Écriture et que nous célébrions l’Eucharistie. Nous avons demandé au Seigneur de nous en dire davantage au sujet de l’Assemblée Mondiale, au-delà du récit du document final, de manière à (pré)voir les perspectives prometteuses ouvertes par l’appel simple et néanmoins profond de Buenos Aires. Nous avons des raisons d’affirmer que nous avons vraiment foi en ce qui s’est produit à Buenos Aires.
Si vous êtes en attente d’une vision, d’un plan stratégique à long terme, vous lirez assurément la seconde partie de la présente lettre. Cependant, nous ne pouvons-nous empêcher de vous dire d’abord et avant tout que nos cœurs étaient brûlants alors que le Seigneur nous parlait !
Nous croyons que Dieu a parlé à la CVX à Buenos Aires. Nous avons de bonnes raisons pour ce faire, et pourtant, il s’agit d’un acte de foi. Peu importe que cela paraisse évident, nous avons expérimenté le discernement communautaire comme le précieux don de Dieu à la CVX aujourd’hui. Il s’agit d’un don à approfondir et partager en même temps que nous sommes en sortie. L’inverse fait sens tout autant : il s’agit d’un don qui nous pousse à sortir et qui, de ce fait, nous appelle à approfondir notre charisme, à partager. En effet, les trois verbes ne font pas référence à un processus linéaire ; il s’agit bien plutôt d’une manière de vivre intégrée.
La CVX est présente à de nombreuses frontières et nous voulons nous sentir « chez nous » là où nous nous trouvons. Le « magis » que nous pouvons offrir dans chaque champ de mission – au-delà ou plutôt en action – consiste à partager la foi en la présence active de Dieu et notre manière de chercher Dieu en toutes choses. L’expérience vécue au cours de notre Assemblée à Buenos Aires est transversale et totalement pertinente à toutes les frontières. Dès lors que l’Assemblée Mondiale s’est réunie dans une tente et que nous souhaitons répéter la dynamique du discernement communautaire partout où cela est possible, plutôt que de parler de discernement, nous voulons déplacer la tente, c’est-à-dire créer des espaces de transcendance partout où nous sommes engagés le plus concrètement. En créant des espaces sacrés destinés à reconnaître et répondre aux mouvements intérieurs de l’Esprit, nous sommes confiants quant au fait que l’Esprit nous guidera vers une plus grande union au Christ, un plus grand amour et un plus grand service des autres. Buenos Aires est transversal à tous nos engagements, personnels et communautaires. C’est pourquoi nous osons affirmer que l’appel de Buenos Aires est vraiment et profondément apostolique.
C’est un appel. Buenos Aires est en train d’advenir. Buenos Aires va se déployer si nous croyons vraiment que Dieu continue de nous parler.
La présente est une lettre chorale, avec diverses expressions des membres de l’ExCo mondial pour chacune des six parties de notre « profession de foi ».
Nous croyons que Dieu a parlé à la CVX à Buenos Aires parce que…
Au cœur de l’expérience, un miracle contemporain s’est produit. Et nous en avons été les témoins.
La communauté, bien que diverse, a prié comme un seul corps.
Le cœur de la CVX mondiale a été déchiré par la souffrance, l’amour et la foi de la population du Barrio San Miguel.
Nous avons été honnêtes et libres de contempler nos péchés et paralysies communautaires.
L’Esprit Saint nous a soufflé de tenter des choses qui ne sont possibles que grâce à l’Amour de Dieu.
Sans utiliser un mode « business », nous avons été envoyés vers le monde.
L’Esprit Saint nous invite à nous donner nous-mêmes au travers de notre don le plus précieux.
Le Seigneur nous a adressé un message clair et puissant.
Nous avons résisté à la tentation d’une avancée « doctrinale » ; nous avons préféré nous ouvrir à un travail de purification et de conversion du cœur.
Nous avons fait une expérience d’intégration et avons reçu la grâce que nous avions demandée : ce fut une reconnexion des personnes, de l’identité et de la mission.
Une expérience de « Buisson ardent », de « sandales ôtées ».
L’Esprit Saint est vivant !
Buenos Aires est une révolution copernicienne, un appel à considérer notre identité d’une manière renouvelée. En plus d’être une communauté de discernement et de service, nous sommes appelés à nous offrir nous-mêmes en cheminant avec d’autres.
Le discernement Communautaire est le précieux don de Dieu à la CVX aujourd’hui
Dans un monde de post-vérités, le discernement est une urgence.
Le Pape François a dit : « Le peuple a besoin d’accueil, d’intégration, d’accompagnement et de discernement, mais le discernement est la dimension la moins développée dans l’Église ».
Dieu nous a montré que le discernement communautaire est au cœur de notre mission. Ce n’est pas seulement un moyen, mais un élément central de notre identité et de notre manière de procéder.
Le discernement Communautaire apporte l’unité dans et par l’intention.
À une époque d’incertitude et dans une société du risque, nous devons développer une démocratie du discernement.
La libération des pauvres commence par la libération de la conscience. Le discernement est un outil pour la libération la plus profonde.
Le discernement communautaire concerne et inclut tout le monde.
Générer des processus et des expériences de discernement avec des personnes en tout lieu où règnent la peur, la division, le doute, la souffrance, le conflit, la mésentente, l’exclusion, les abus, l’échec, le non-sens… Partout où la liberté et l’amour ont été perdus.
Nous sommes appelés à ouvrir des espaces de discernement communautaire partout où nous sommes présents dans le monde d’aujourd’hui. Que notre présence même invite au discernement communautaire. Que nous puissions irradier une ouverture sainte.
Le discernement produit la réconciliation.
Nous croyons qu’en tentant de nous connecter à l’Esprit Saint, nous pouvons entendre les mouvements de l’Esprit en nos cœurs et être des liens pour l’amour et l’action du Christ.
Approfondir, partager et sortir. Ou sortir, partager et approfondir !
Il s’agit d’un cycle, d’une spirale ascendante, qui mène à la croissance de l’autre.
Sortir, partager et approfondir sont des points d’accès au chemin de notre vocation, à partir de notre contexte particulier. Commençons là où nous sommes.
« Nous voulons sortir, mais de cette manière » (un délégué à l’Assemblée, pointant en direction de la tente où s’étaient déroulées les séances plénières).
Le document final ne propose pas d’étapes précises. Il n’est pas question d’un processus préétabli, mais bien d’être à l’écoute en fonction de la réalité. Le document final est ouvert.
Soyons en prise avec la réalité. C’est la réalité qui inspire le Pape François en vue du renouveau de l’Église.
Aider chacun(e) à être attentif(ive) à ceux qui sont proches dans sa vie quotidienne.
Pour avoir un impact réel dans le monde, commençons là où nous sommes, avec ce que nous avons.
Etre une vraie communauté laïque ignatienne.
Notre charisme CVX est un don à chérir, à nourrir et à soigner, de manière à le partager et révéler la paix, la joie et l’amour du Christ.
Buenos Aires est un appel à une connexion profonde avec le Christ et à un élan apostolique. Nous sommes appelés à être des intimes de Jésus en mission.
Buenos Aires est transversal et totalement pertinent à toutes les frontières
Nous avons été envoyés pour discerner ensemble aux frontières.
Nous verrons un foisonnement de champs apostoliques et de frontières.
L’appel de Buenos Aires est à la fois une manière de chercher et de trouver ce qui est le plus nécessaire, et une manière d’être présent à toute frontière.
Si nous sommes suffisamment courageux, nous saurons que notre manière d’être EST mission et que nos vies doivent être offertes avec audace, totalement, dans toutes les périphéries où l’Esprit est à l’œuvre.
La diversité et la fragilisation des familles exigent plus d’occasions de discernement.
La migration et la mobilité des personnes exigent la construction de ponts de discernement partagé pour la société que nous bâtissons.
Nous avons demandé la grâce d’une meilleure intégration de notre charisme. En guise de bonus, nous avons reçu un message clair au sujet de l’unité dans une CVX diverse.
« Le désir d’être contemplatifs dans l’action se trouve au cœur de votre spiritualité ignatienne. Contemplation et action, les deux dimensions ensemble : puisque nous ne pouvons entrer dans le cœur de Dieu qu’à travers les plaies du Christ, et nous savons que le Christ est blessé dans les gens affamés, les non-éduqués, les isolés, les personnes âgées, les malades, les détenus, dans toute chair humaine vulnérable. »
Nous voulons déplacer la tente, c’est-à-dire créer des espaces de transcendance là où nous sommes engagés le plus concrètement
Créer des espaces sacrés là où nous sommes. Créer des espaces de rencontre, des lieux ouverts.
Déplacer la tente et demeurer avec ceux qui y entrent, plutôt que distribuer des modes d’emploi pour monter une belle tente.
Nous tous, maintenant, nous ne devons pas attendre d’être parfaits.
Partout où nous allons, nous sommes appelés à ouvrir des espaces de discernement. Où que nous vivions, nous vivons de cette manière. Quand nous quittons, la manière de faire est transformée.
Nous avons besoin d’une expérience de conversion plutôt que de perfection ou de documents parfaits.
Buenos Aires est en train d’advenir
Le mystère est encore en train de se déployer. La longue conversation avec l’Esprit est en cours.
Les vraies frontières nous mènent sur des chemins inexplorés, guidés seulement par la lumière de l’Esprit. C’est l’invitation et la grâce que nous sommes appelés à porter ensemble.
Quand Dieu parle, nous avons besoin de temps pour comprendre, pour nous laisser convertir et pour consentir.
L’invitation est claire : soyons des témoins.
Nous sommes dans les mains de Dieu, ce qui n’est pas toujours un lieu confortable mais en fin de compte, un lieu de responsabilité.
Si nous répondons à l’appel, quelque chose de « grand » va se produire ; c’est l’Esprit qui génère une vague profonde que nous n’avons pas initiée et que nous ne contrôlons pas.
Buenos Aires est en train d’advenir, ce qui nous ramène à l’acte de foi : nous croyons que Dieu a parlé à la CVX à Buenos Aires.
- Rojean and Alwin MACALALAD
- Manuel MARTINEZ
- Daphne HO
- Fernando VIDAL
- Diego PEREIRA
- Najat SAYEGH
- Catherine WAIYAKI
- Ann Marie BRENNAN
- Denis DOBBELSTEIN
[*SI VOUS SOUHAITEZ EN SAVOIR DAVANTAGE AU SUJET DES PERSPECTIVES QUI SONT LES NÔTRES :*]
À Buenos Aires, nous avons revisité notre charisme, de manière à oser nommer ce qui nous avait permis d’affirmer avec confiance que la CVX elle-même est un don pour l’Église et le monde. La question était fondamentale et universelle. Nous savions donc que ce ne serait pas un discernement classique (c’est-à-dire un discernement qui mènerait à un choix entre plusieurs options, une élection). Le miracle de cette Assemblée Mondiale, c’est que nous avons osé écouter l’Esprit Saint en communauté, sans idée préconçue quant à la réponse. Ce fut un discernement qui commença par une grâce désirée et qui nous mena vers une expression renouvelée de notre identité et de notre vocation. Nous pouvons ainsi parler d’une expérience fondatrice, qui se répandra surtout par le témoignage et par l’invitation à vivre la même démarche.
Désormais, chaque communauté, qu’elle soit locale, régionale, nationale ou continentale, est appelée à poursuivre l’expérience du discernement communautaire dans des contextes plus classiques, où il s’agit d’opérer un choix par rapport à une question précise, que ce soit au sein même de la CVX ou en mission aux frontières. Cependant, ne vous méprenez pas : Buenos Aires a confirmé le désir apostolique de la CVX, sans aucune ambiguïté. En considérant le discernement communautaire comme un don et un appel, nous n’avons pas contemplé la CVX de manière narcissique. Bien plus, la CVX a exprimé son désir d’être en sortie de manière fidèle à sa vocation la plus profonde.
Buenos Aires n’ajoute rien et ne soustrait rien aux intuitions des Assemblées antérieures. Pourtant, nous y avons entendu un appel très fort : l’appel à offrir ce que nous portons de plus précieux. Pas seulement la spiritualité ignatienne ou l’esprit de communauté ou l’élan missionnaire, mais plutôt une meilleure intégration des trois dimensions. C’est l’énorme potentiel prophétique de cette Assemblée. Qui plus est, en nous appelant à nous donner nous-mêmes, avec notre désir et notre capacité à voir le lien mystérieux entre charisme, vocation et mission, l’Esprit nous a fait entrevoir « en prime », par surabondance, le lien fondamental qui fera progressivement de la CVX un véritable corps apostolique de laïcs ignatiens. C’est ce que l’un d’entre nous a résumé dans cette formule limpide : Le discernement communautaire offre l’unité dans/par l’intention.
Nous sommes convaincus qu’il faudra du temps pour assumer l’appel et déployer notre potentiel. Sans doute bien plus que 5 ans. Cependant, pour éviter de donner l’impression (fausse) que nous devons nous préparer longuement avant de bouger, nous proposons d’interchanger sans cesse l’ordre des trois verbes utilisés dans le document final de l’Assemblée Mondiale. Nous vous proposons même de chercher les synonymes qui exprimeront de manière plus précise ce que cela signifie actuellement « d’approfondir, de partager et de sortir » pour votre communauté.
S’il faut néanmoins parler de l’ExCo, sachez que nous VOULONS consacrer TOUT notre mandat pour aider à guider et articuler TOUS les efforts en réponse à l’appel de Buenos Aires :
- Le discernement communautaire est une manière de vivre qui est essentiellement apostolique. Le discernement communautaire se combine parfaitement avec l’iceberg présenté par Franklin Ibanez au Liban. C’est une attitude à cultiver à tous les niveaux, dès le niveau « A », dans nos familles, dans nos environnements professionnels, dans tous nos lieux de service.
- Partager notre don à toutes les frontières, déjà identifiées et à venir. Plus que jamais, nous sommes invités à nous interroger sur ce que cela implique d’être laïcs et ignatiens dans nos lieux de mission présents et à venir. Il ne s’agit pas d’être original par plaisir ou par défi, mais bien de considérer comme une responsabilité la promotion des « outils » qui aident à être contemplatifs dans l’action. Ce n’est pas un trésor à chérir, mais un don à partager, en osant faire preuve de créativité dans le travail pastoral.
- Une vision intergénérationnelle pour partager notre charisme. Si nous évoquons plus urgemment le défi de la transmission de notre charisme aux prochaines générations, notre engagement auprès des jeunes devient une nécessité plus claire pour concrétiser l’appel de Buenos Aires. Si nous croyons que la CVX est un don pour l’Église et le monde, c’est la prochaine génération qui nous « jugera » sur notre capacité à transmettre le feu.
- Formation au discernement communautaire. La formation est une exigence élémentaire de la vitalité et de la pérennité de notre communauté. Nous sommes toutefois invités à aborder ce service à la communauté dans l’esprit de Buenos Aires, avec le souci de promouvoir la capacité de nos membres à devenir des acteurs de changement. L’ExCo peut mobiliser des moyens techniques pour faciliter les échanges d’expertise. Il veillera aussi et surtout à mettre en évidence des outils de formation qui aident les communautés locales à tirer le meilleur parti du DESE et les membres à devenir des praticiens confiants du discernement communautaire comme service d’Église.
- La collaboration est une manière logique de procéder. Nous voulons développer des collaborations en privilégiant celles qui offrent le plus de potentiel pour concrétiser l’appel de Buenos Aires. La collaboration n’est pas un thème à explorer de manière conceptuelle, mais bien une manière de faire incontournable pour inscrire la CVX dans le « kairos » de l’Église.
- La communication elle-même ne peut pas être conçue comme un simple moyen au service de la vie de la CVX. Même la communication destinée prioritairement à nos membres va être revue en profondeur pour favoriser l’émergence d’un corps apostolique.
Nous voulons regarder au-delà de l’horizon, c’est-à-dire nous projeter dans un avenir raisonnablement prévisible, mais pas assuré. Un avenir à 10, voire même 20 ans, qui verrait la CVX devenir un acteur reconnu pour sa capacité à accompagner des discernements communautaires. Il y a bien des inconnues sur ce chemin, mais il est certain que nous devons poser des jalons maintenant pour que ceux et celles qui nous succéderont puissent poursuivre le travail avec confiance et enthousiasme.
Original en français